Les ondes radio sont-elles adaptées à Internet ?
Technologie nouvelle, la boucle locale radio réveille pourtant de vieux démons. La BLR est en effet basée sur les ondes radios. Sujet complexe, ces dernières n’ont pas très bonne réputation aux yeux du public. La météo en serait la principale raison. Georges Bonnerot, expert radio et Emmanuel Sprauel, directeur technique de Firstmark, opérateur BLR, nous apportent leurs réponses et déterminent l’impact de la météo sur la BLR ainsi que les choix portés sur les fréquences radio.
VNUnet: L’ART a fixé deux fréquences sur lesquelles les opérateurs pourront commercialiser leurs offres d’accès Internet via la boucle locale radio. Quelles sont-elles ? Et, surtout, ont-elles des incidences sur les fonctions de la BLR ?
Georges Bonnerot:
Les fréquences des ondes radio sont larges. Cela va de quelques kilo hertz à des Tera hertz. Les usages professionnels commencent au delà de quelques Giga hertz pour la Boucle Locale Radio. L’ART a opté pour une bande fréquence de 3,5 GHz et une autre de 26 GHz. Plus la fréquence est élevée et plus le débit est élevé. L’opérateur peut ainsi partager une même station radio avec un plus grand nombre d’abonnés et amortir plus vite son coût. Toutefois, la portée des ondes est dans ce type de configuration limitée à 2-3 kilomètres. En revanche la bande des 3,5 GHz permet d’émettre plus loin, environ 10 kilomètres, mais à des débits plus faibles.
Emmanuel Sprauel:
Seuls les deux opérateurs nationaux ont les deux bandes de fréquences. Les opérateurs régionaux émettent seulement sur la fréquence des 26 GHz, exception faite pour les départements d’outre-mer. Le réseau à 26 GHz sera commercialisé plutôt dans des régions à forte densité, alors que le 3,5 GHz sera utilisé pour des régions moins peuplées.VNUnet: Le 26 GHz est-il suffisant pour proposer des liaisons haut-débit ?
Georges Bonnerot:
Le choix arrêté par l’ART prend en compte plusieurs paramètres comme notamment la disponibilité des fréquences, des débits demandés par les entreprises et aussi du coût. Aujourd’hui, je pense que le 26 GHz permet de couvrir l’ensemble des besoins du marché. Mais je ne peux pas me prononcer sur 5 ans…
Emmanuel Sprauel:
Le choix de l’ART a aussi été dicté par une volonté d’harmonisation européenne et même mondiale. Tous les pays se trouvent approximativement au voisinage des 26 GHz. Même constat hors Europe, où les Etats-Unis émettent sur la bande de fréquence des 28 GHz.VNUnet: Les ondes radio sont-elles capricieuses ? Autrement dit, dépendent-elles des conditions météo ?
Georges Bonnerot:
Je ne dirais pas que les ondes radio sont capricieuses. On les connaît depuis près d’un siècle. Tout le problème est lié à l’usage que l’on en fait… Concernant la météo et la propagation des ondes, il est effectivement exact que qu’une trop forte hygrométrie peut nuire à la propagation des ondes radio. Ce phénomène prend de l’importance au-delà des 10 Ghz, par conséquent, la BLR est confrontée à ce problème. Mais aujourd’hui l’impact de la météo sur les ondes est mesuré, quantifié. Nous savons par exemple que l’absorption de l’énergie dépend de la taille des gouttes d’eau.
Emmanuel Sprauel:
Le phénomène étant connu, on dimensionne alors le réseau en fonction de la météo locale. Depuis des années on enregistre les densités de pluie à travers toute la France. Tous ces chiffres permettent alors d’étudier avec exactitude la portée d’une station radio. Ainsi le réseau n’est pas identique sur l’ensemble de l’Hexagone. Le rayon de couverture est ainsi plus petit dans le Sud que dans le Nord de la France. Il faudrait dès lors des orages de type mousson pour interrompre une connexion Internet par le biais de la boucle locale radio si le réseau n’est pas dimensionné pour cela.VNUnet: Est-ce pour cela finalement que la bande des 26 GHz n’a pas été retenue pour les DOM ? Départements où les pluies sont très violentes ?
Emmanuel Sprauel:
La météo, la plus la faible densité de population, ont effectivement contribué à ce que l’ART n’accorde pas de licence de 26 GHz dans les DOM. Toutefois, cette fréquence peut très bien fonctionner même dans ces régions, seulement la station de base n’aura un rayon de couverture que d’un kilomètre environ. Autrement dit, cela reviendrait très cher à l’opérateur, et donc à l’usager, d’utiliser cette fréquence radio.VNUnet: Pour le moment vous êtes le seul opérateur à pouvoir proposer des offres sur le 3,5 Ghz. Vous avez déjà commercialisé vos services sur le 26 GHz. Les régions un peu isolées pourront bénéficier de l’accès à Internet par les ondes à quelle date ?
Emmanuel Sprauel:
Il est évident que l’on ne peut pas tout couvrir en même temps. Nous avons déjà commercialisé nos services à Nantes et à Lyon, d’autres villes suivront dans le courant de l’année. D’ici quelques mois, nous proposerons des services basés dans la bande de fréquence des 3,5 GHz conformément à nos engagements auprès de l’ART.VNUnet: Que se passe-t-il si un prospect se trouve en dehors de la zone couverte par la station de base ? L’opérateur sera-t-il tenté de concrétiser tout même l’abonnement ?
Georges Bonnerot:
La portée des ondes est de 2 à 3 kilomètres. Dans ce cas, une antenne classique d’un diamètre de 26 centimètres est nécessaire à l’abonné pour qu’il reçoive les ondes. Si la distance entre la station de base et un client dépasse légèrement les trois kilomètres, l’abonné aura simplement besoin d’une antenne plus grande.Emmanuel Sprauel:
Par ailleurs, le contrat passé entre l’opérateur et le client garantit à ce dernier une qualité de service et les débits souscrits.